Jean Leclerc: personnalités multiples
par Annabelle Poisson
dans Clin d'oeil, janvier 2006
Entrevue

Par Annabelle Poisson
Photos: Peter Morneau
Stylisme: Annie Richard

«Ne vous en faites pas, il sera là, nous assure son attachée de presse. Je ne sais pas combien de temps il restera, mais il sera là...» Ne photographie pas Jean Leclerc qui veut. L'homme a la réputation de n'en faire qu'à sa tête. Mais au-delà de tous les clichés qui le caractérisent, il en est un qui prédomine: son charme fou. Toutes les filles présentes lors de ce reportage mode le confirment!

Imaginez le topo: deux heures avec l'artiste-tous-azimuts, dans un studio de Villeray, pour un reportage mode. On le fringue, on le maquille et on lui dicte les poses à prendre. Entre deux retouches, Leclerc parle de la suprématie de la belle-mère dans le Japon traditionnel, énonce sa propre théorie sur les sociétés hiérarchisées et dénigre publiquement son profil gauche. La scène est psychédélique: «My nose is amazingly croche!» lance-t-il au photographe Peter Morneau. Un déploiement de rires, une courbette. «Ah, ah! Avec cette veste-là sur le dos, je pourrais narguer n'importe quel homme riche!» Puis, une douce pensée pour sa dulcinée. «Ma blonde va me trouver beau, hein?» Il enchaîne: «Elle est vraiment belle. Presque trop belle pour moi. Je sais pas ce qu'elle fout avec un gars comme moi...» Et encore ce rire puissant. Ainsi parle M. Leclerc. S'il ne parle pas, c'est qu'il piaffe. Ou gigote.

Après quelques boutades sur le profil gauche, l'angoisse du joker-chantre de 44 ans est palpable dans tout le studio: si, si, Jean Leclerc est morphologiquement complexé. Alors que toute l'équipe se massait autour de l'ordinateur pour admirer les clichés encore tout chauds, l'homme-icône se méprisait: «Ouach! que je suis laid! Les filles, qu'est-ce que vous en pensez?» Jugez-en par vous-même...

Fait peut-être étonnant (mais pourtant logique), Jean Leclerc aime être bien sapé. «Il s'intéresse à la mode; c'est un adepte du beau, de l'esthétique. Il n'a jamais eu besoin de styliste», nous fait remarquer Marilou David, son attachée de presse. Quoi d'autre? «J'aime les femmes (on l'aurait parié!), s'exclame-t-il. On m'a fait toute une réputation, avec les années. Mais je suis un gars fidèle et j'aime ma blonde. Et c'est pas une fille jalouse, elle...»

(Re)Rebirth

Pour en finir avec les clichés, Jean Leclerc ne boit plus et ne se drogue plus. Plus étonnant: il se lève à l'heure des poules! Ces jours-ci, il passe beaucoup de temps en studio, à plancher sur un nouvel album qui – on touche du bois du Kunderkrupt – devrait sortir au printemps prochain. Le son sera neuf, loin devant (derrière?) Leloup. «Je me suis donné comme défi d'écrire des chansons complètement différentes des précédentes. Si tout va bien et que je les sors, je n'ai pas envie de donner des shows pis de chanter mes vieilles tounes. Ça m'étonnerait même que j'aie envie une seule fois de faire d'autres shows.» Normalement, le nouveau disque devrait sortir sous le patronyme «Leclerc». Mais, Leloup rongeant les pissenlits par la racine et Massoud s'étant exilé en Chine (non, n'ajustez pas votre appareil), Leclerc dit «préparer» un nouveau personnage qui pourrait bien faire une entrée en scène prochainement. «Je ne dévoile pas son nom, c'est secret.» Bon... Peut-on miser plus sur un Liu Xaoping-Zemin que sur un Marcel Barnabé-Sanschagrin? Allez savoir...

Signé Leclerc

Jean Leclerc revient à ses premières amours: l'écriture. Il travaille présentement à un scénario de long métrage et affirme avoir quelques autres bonnes idées qui traînent dans le tiroir. «Je vais "guesser" qu'il doit bien rester des producteurs qui sont capables de voir c'est quoi une réelle aventure où tu te pètes la gueule pis où t'as du fun... Avec Massoud, ça a marché. Pourtant, c'était pas évident.» Et s'il ne trouvait pas de producteurs ou de diffuseurs assez audacieux? «Je vais me lancer dans le commerce d'armes blanches; je vais aller débusquer les derniers sabres japonais perdus en Chine pour les vendre au musée de Tokyo!» On le suit?

R.I.P. Jean Leloup, 1985-2003

Jean Leloup aurait 20 ans si son créateur ne l'avait pas «tué». Ce dernier lui offre un hommage posthume en lançant une compilation de ses meilleurs titres. Je joue de la guitare 1985-2003, c'est 21 titres; des incontournables («Alger», «Isabelle», «Cookie»), des versions inédites et un DVD réunissant tous ses vidéoclips. «Je me demande encore comment certaines de mes chansons ont pu "pogner". Pour Je joue de la guitare, j'ai jamais compris. Le monde aimait ça?» Ben tiens.
Je joue de la guitare 1985-2003, Audiogram

Le romancier

C'est l'histoire d'un homme blasé qui tombe un jour sur un complet qui lui sied à merveille. L'habit justifiant la quête, il part à la découverte du monde, arborant fièrement son costard. Massoud al-Rachid foulera d'abord les terres du Kunderkrupt et terminera son périple aux côtés d'étranges entités cosmiques. «C'est un p'tit livre drôle sur la nature humaine. Mais j'ai trouvé ça tellement dur! Les quatre derniers mois, ça me prenait tellement de mon temps; je trouvais ça ridicule combien c'était difficile. Écrire un truc drôle, y a rien de pire.»
Noir destin que le mien, Massoud al-Rachid, Leméac

Photo: T-Shirt de coton fin kaki (Diesel, 85 $ chez Men's), pull de tricot à gros boutons (Rare, 385 $ chez North little Italy).

Photo: Pull de lainage vert avec col polo et encolure en V (Énergie, 180 $ chez Men's), manteau à carreaux à double boutonnage (Crosby, 695 $ chez Men's), jean foncé (Lindbergh, 265 $ chez Men's), bottillons de cuir (Jog Host, 398 $ chez Browns)

Photo: Chemise western à carreaux en patchwork (Rare, 291 $ chez North Little Italy).
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Dernière mise à jour le 1 août 2006.
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